Le refus d’un accord de mobilité constitue un motif économique de licenciement autonome – Exemple

Le refus d’un accord de mobilité constitue un motif économique de licenciement autonome – Exemple

Cass. Soc, 2 décembre 2020, n°19-11.186

L’affaire :

Suite à la perte d’un marché touchant plusieurs départements, une société ferme un de ses sites et, décide d’affecter les salariés concernés dans d’autres régions.

Pour se faire, l’entreprise avait conclu avec les organisations syndicales représentatives un accord de mobilité interne (AMI) lui permettant d’imposer une modification du contrat de travail.

Certains d’entre eux ayant refusé leur mobilité, l’entreprise avait procédé à leur licenciement pour motif économique, dans le cadre d’une procédure individuelle.

En contestation, les salariés faisaient notamment valoir que l’accord de mobilité interne conclu avait pour objet une réduction d’effectif alors qu’un tel accord “ne pouvait être négocié et signé que dans le cadre de mesures collectives d’organisation courantes sans projet de réduction des effectifs ».

Selon eux, un PSE aurait dû être mis en œuvre. Ils reprochaient, également, à la cour d’appel de ne pas avoir vérifié l’existence d’une cause réelle et sérieuse à leur licenciement.

La décision :

La Cour de cassation se prononce sur deux points.

Tout d’abord, elle constate que l’accord de mobilité interne avait été négocié en dehors de tout projet de réduction d’effectifs, afin d’apporter des solutions pérennes d’organisation de l’entreprise confrontée à des pertes de marché sur des territoires géographiques peu actifs. Ainsi, cette réorganisation constituait bien une mesure d’organisation courante, peu importe qu’elle ait conduit in fine à la suppression de certains postes et la ré-affectation de certains salariés sur d’autres postes, la réduction des effectifs n’étant en réalité qu’une conséquence indépendante de l’accord.

Sur les ruptures, les salariés contestaient la cause économique de leur licenciement, reposant sur leur seul refus de se voir appliquer l’accord de mobilité interne.

Sur cet aspect, la Cour de cassation raisonne en deux temps:

  1. Elle pose le principe suivant lequel le refus d’application d’un accord de mobilité interne constitue un motif économique de licenciement autonome. Ainsi, il n’est pas nécessaire que la

modification refusée par les salariés soit fondée sur des difficultés économiques, des mutations technologiques, une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou une cessation complète de l’activité de l’entreprise.

  1. En revanche, le juge conserve un contrôle. En effet, bien que constituant un motif économique autonome, le juge doit en vérifier le caractère réel et sérieux, conformément à l’article 4 de la convention internationale du travail n°158.

Ce contrôle s’opère en deux temps. Les juges doivent s’assurer que l’accord de mobilité interne :

  • est conforme aux dispositions du code de travail,
  • est justifié par les nécessités du fonctionnement de l’entreprise et, qu’il intervient bien pour ces motifs.

Portée de la décision :

Pour la première fois, la Cour de cassation se prononce sur l’étendue du contrôle du juge en matière de licenciement économique consécutif à un refus de mobilité, en application d’un accord de mobilité interne. Si l’AMI est abrogé (remplacé depuis par l’accord de performance collective (APC)), nul doute que cet arrêt « PRBI » aura vocation à s’appliquer aux licenciements motivés par le refus des salariés de voir modifier leur contrat de travail, en application d’un accord de performance collective (APC).